Contes et légendes d'Océania


Les hurlements des Hauts

Cette histoire que l'on narre sur les terres d'Oredia se passe au nord dudit continent, dans la lugubre et mystique Trang-Oul, repaire de nécromanciens, et cloaque de magie titanide. La Trang-Oul actuelle n'est qu'un fantomatique voile de la Trang-Oul du passé, une sensation imparfaite de la glorieuse et puissante ville qu'elle était alors. À cette époque ; l'époque où la cité était prospère et reconnue, débute notre conte.

Il y avait au nord de la ville, en des terres plus reculées, plus sombres, moins visitées, une colline abrupte, haute et solide comme un roc. Les sentiers de terre qui formaient le chemin au sommet étaient escarpés et tordus, comme déformés par la rage d'Avgavaï le Flamboyant lui-même. Quelques arbres morts sourdaient ça et là, comme seul décor. Triste, monotone paysage. Au faîte de cette colline jaillissait un imposant manoir. Fait de marbre noir, aux contours carrés et pointus, le manoir était découpé de la sorte : un imposant bâtiment parfaitement rectangulaire qui formait la majeure partie, et une tour à l'aspect effrayant en arrière-fond. Cette tour n'avait ni fenêtres, ni porte extérieur. Pour y rentrer, nul doute que l'entrée fût bien dissimulée dans le manoir.

On appelait ce manoir le manoir des Hauts. Derrière lui se dressait une petite forêt, qui faisait tout l’autre versant de la colline. Une forêt fait d'arbres de races diverses, de végétaux mêlés, d'animaux à l'aspect inhabituel. Forêt à l'aura malfaisante et inquiétante.

Le manoir était comme un bloc d'acier, une forteresse imprenable. Il dominait de toute sa grandeur et de toute sa splendeur l'ensemble des collines et des plaines environnantes. Chaque arête tranchante, comme un défi au ciel, rajoutait à la puissance de la structure. Un homme y habitait. Un noble, ancien nécromancien, descendant d'une famille connue et reconnue. Il était d'un âge avancé. La vieillesse avait entamé son visage, y creusant des rides, y enfonçant ses pommettes. Ultime vestige de sa jeunesse fané, ses cheveux, d'un blond parfait, pâle. Des cheveux fins, comme coupés par le soleil. Son dos était légèrement courbé, mais point trop, il conservait une allure étonnante, et rayonnait d'une prestance et d'une élégance peu commune. Ses yeux, d'un vert émeraude, étaient profonds et solitaires, teintés d'une mélancolie présente en toute circonstance.
Jamais il n'arborait le moindre sourire. Sa bouche était sèche et fermée. Il se déplaçait lentement, à pas mesurés, s'aidant d'une canne de fer blanc avec un pommeau de forme arrondie représentant Charon le Passeur. Eugène Kifka était son nom. Il avait eu une femme qu'il avait aimée de toute son âme, plus que lui-même, morte il y a bien longtemps. Devenue folle suite au maléfice terrible d’un quelconque fanatique fondateur, son mari avait été contraint de lui prendre la vie, car elle était devenue extrêmement dangereuse, attaquant quiconque tombant sous ses yeux.

Il possédait un aide, un domestique pour l'aider dans ses tâches et entretenir la maison. L'homme était fort et grand, dépassant les deux mètres, et d'une carrure impressionnante. Ses épaules étaient larges et carrées, sa mâchoire grande et solide. Ses bras étaient comme deux poutres, et on n'aurait pu deviner en lui le moindre soupçon de délicatesse. Ses cheveux noirs et courts, ses yeux marron et communs, son visage carrée, rajoutaient à la rusticité de son apparence. Il ne parlait pas beaucoup, et poussaient majoritairement des grognements pour donner son avis. Eugène l'appelait Frank.

Des cris. Voilà ce qui faisait le mystère du manoir. Des cris aigus et puissants, par moments. Ces hurlements déchiraient l'air, tranchants comme une lame, et se répercutaient en échos. Parfois, alors qu’Eugène faisait des mondanités en invitant quelques amis à déjeuner, les hurlements bondissaient. Les convives prenaient généralement peur. Eugène leur expliquait que ces cris provenaient d'une bête vivant dans la forêt, derrière son manoir. Bien que cette explication suffît à certains, d'autres juraient que les cris provenaient bel et bien du manoir, et l'on nommait souvent la tour comme la source.
Très vite, le manoir acquit une mauvaise réputation, et on le disait hanté. Peu de gens s'y rendaient, et les plus folles théories circulaient sur l'origine des cris.
La tour, grande et fière, était le centre de tous les regards. Qui y avait-il ? Un monstre, fruit d'expériences impures et morbides ? Un prisonnier, torturé ?
Personne ne savait... jusqu'à ce jour.

La guerre arriva, Whylem comme ennemi. La bataille faisait rage, et dans les deux camps les destructions et les tueries furent tragiques. Un jour, un groupe de quatre puissants magiciens fondateurs de Whylem se présentèrent au pied de la colline. Ils avaient entendu parler des abominations du manoir des Hauts, et souhaitaient purifier l'endroit. Ils gravirent lentement le sentier escarpé, ressentant à chaque pas un peu plus de pression... Les hurlements se firent entendre à mi-chemin, mais aucun ne recula.

Eugène Kifka et Frank les attendaient, debout, devant la porte principale du manoir. Le nécromancien les somma de partir rapidement, de rebrousser chemin. Mais les quatre magiciens n'étaient pas là pour parler, et sorts et sortilèges bondirent derechef. La bataille fut courte mais intense. Frank était un guerrier enragé, et maniait une énorme épée avec facilité. Eugène avait des restes de son passé de nécromancien, et combattit avec la fougue qui lui restait.
Mais les magiciens étaient puissants, parmi les meilleurs de Whylem. Des boules de feu jaillissaient de leurs doigts, et consumaient tout, comme un acide incoercible.
Les deux Trang-Ouléens furent vaincus, atrocement mutilés. Les hurlements reprirent. Les magiciens décidèrent d'en finir une bonne fois pour toute avec toute cette démence, et pénétrèrent avec véhémence dans le manoir maudit. Ils n'en ressortirent jamais.

Plusieurs mois s'écoulèrent, la guerre arriva à son terme... Personne d'autre n'avait osé explorer le manoir, et personne ne savait ce qu'il était advenu des quatre magiciens.
Cependant, certains prétendent avoir aperçu une silhouette de femme errer derrières les fenêtres de la demeure... Elle y resterait fixée quelques minutes, avant de s’en retourner dans les ténèbres de la demeure... Certains y ont même reconnu la femme d'Eugène, la femme que tous croyait mort il y a bien longtemps... D'aucuns disent que son mari l'avait enfermé dans la tour, pour préserver les autres de sa folie...

Quoi qu'il en soit, le manoir des Hauts est un lieu dangereux, dont nul ne revient.

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